Mazerolle débute sa carrière en se formant auprès de Picot, maître reconnu de la peinture d’histoire et des scènes mythologiques. Sous la tutelle de Picot, il développe une maîtrise des compositions classiques, ce qui le prédispose naturellement à embrasser les thèmes historiques et religieux alors prisés par l’académie. Ses premières œuvres s’inscrivent dans cette tradition, choisissant des sujets tirés de l’Antiquité, du Bas-Empire et de la période mérovingienne. Ses premiers tableaux démontrent déjà une sensibilité aux jeux de lumière et une palette subtile, deux traits qui deviendront caractéristiques de son style.
Toutefois, malgré son aspiration à être reconnu comme peintre d’histoire, Mazerolle s’aventure aussi dans d’autres genres. Il réalise des portraits et des scènes de genre, et se voit confier plusieurs commandes d’œuvres religieuses. Mais c’est véritablement dans le domaine de la décoration monumentale qu’il trouve sa voie et qu’il acquiert une renommée durable. Son talent pour les grandes compositions théâtrales le mène rapidement à réaliser des décorations d’envergure pour des personnalités influentes, tant publiques que privées.
Si Mazerolle touche à différents genres dans sa jeunesse, sa carrière prend un tournant décisif en 1860 lorsqu’il reçoit sa première grande commande de décoration monumentale : la peinture du plafond du théâtre de Baden-Baden. Cette œuvre, représentant les Muses, marque le début d’une longue série de projets pour des théâtres en France et à l’étranger. Dès lors, Mazerolle se spécialise dans la création de décors pour des salles de spectacle, des foyers et des coupoles, répondant à la demande croissante d’une bourgeoisie avide de grands décors fastueux pour ses lieux de divertissement.
Son tempérament joyeux et sa capacité à capturer l’essence dramatique et émotionnelle de ses sujets se prêtent parfaitement à l’art de la scène. Il semble avoir une affinité naturelle pour la décoration des théâtres, où il peut laisser libre cours à son imagination tout en respectant les contraintes imposées par l’espace et la perspective. Ses œuvres sont empreintes d’un dynamisme palpable, souvent animées par des figures mythologiques ou allégoriques qui flottent dans des compositions légères et aériennes.
Une rencontre déterminante dans sa carrière est celle avec Émile Perrin, administrateur de la Comédie-Française. Sous son égide, Mazerolle devient un artiste incontournable pour la décoration de salles de théâtre. Il crée notamment le rideau de scène pour Le Roi s’amuse de Victor Hugo, une commande prestigieuse qui confirme son statut d’artiste décorateur de premier plan.
L’œuvre fondatrice de sa carrière dans le domaine de la décoration théâtrale est sans conteste la peinture du plafond du théâtre de Baden-Baden en 1860. Cette commande marque une étape clé dans l’ascension de Mazerolle. Le plafond représente les Muses, symboles des arts et des lettres, et constitue une véritable démonstration de la maîtrise qu’il a acquise dans la gestion des grands espaces. Les Muses flottent gracieusement dans une composition harmonieuse, créant une atmosphère à la fois majestueuse et légère, tout en capturant l’essence de l’inspiration artistique.
Ce projet inaugure une série d’œuvres similaires, où Mazerolle, tout en restant fidèle aux canons académiques, introduit une vivacité et une élégance qui lui sont propres. Son utilisation des jeux d’ombres et de lumières, alliée à une parfaite maîtrise des lignes, lui permet de créer des compositions qui semblent s’étendre au-delà des limites physiques du cadre, donnant aux spectateurs l’illusion d’un espace infini.
Fort de cette première reconnaissance, Mazerolle reçoit de nombreuses commandes publiques, qui font de lui l’un des décorateurs les plus en vue de son époque. En 1869, il est sollicité pour décorer le théâtre d’Angers, sous la direction de l’architecte Auguste Magne. Là encore, il met en scène des allégories, avec des figures comme la Comédie, la Tragédie, et la Danse, qui ornent le plafond du foyer. Ces figures allégoriques, représentées avec une grande maîtrise de l’anatomie et du mouvement, témoignent de l’érudition artistique de Mazerolle et de sa capacité à concilier tradition et modernité.
Son talent est également sollicité pour des projets de grande envergure à Paris, notamment au Conservatoire d’art dramatique, où il reprend une nouvelle fois le thème des Muses, mais avec des variations dans la composition et le style. Ces commandes publiques illustrent non seulement la diversité de son répertoire, mais aussi son aptitude à répondre aux attentes des institutions tout en imprimant sa propre vision artistique.
L’un des chefs-d’œuvre de la carrière de Mazerolle est sans aucun doute la commande du plafond de la Comédie-Française en 1878. Cet immense projet, destiné à l’une des plus prestigieuses institutions théâtrales françaises, est une consécration pour le peintre. La composition représente des figures emblématiques du répertoire de la Comédie-Française, avec des références explicites aux grandes œuvres de Molière, Racine, et Corneille. Mazerolle y déploie toute sa maîtrise technique et artistique, créant une œuvre d’une érudition et d’une virtuosité remarquables.
Malheureusement, ce plafond sera détruit en 1900 lors d’un incendie causé par l’installation de l’éclairage électrique, une tragédie qui prive la postérité de ce chef-d’œuvre. Néanmoins, la réputation de Mazerolle en sort grandie, et il est élevé au rang d’officier de la Légion d’honneur en reconnaissance de sa contribution à l’art français.
En plus de ses peintures monumentales, Mazerolle a également marqué son époque par ses contributions à l’art de la tapisserie. En 1872, il reçoit la commande de huit tapisseries pour la rotonde du Glacier de l’Opéra Garnier, tissées par la manufacture des Gobelins. Ces tapisseries sont destinées à décorer un lieu emblématique du Paris de la Belle Époque, et témoignent de la polyvalence de Mazerolle en tant qu’artiste.
Ses tapisseries, tout comme ses peintures, reflètent une grande attention aux détails, une utilisation harmonieuse des couleurs, et une capacité à créer des compositions équilibrées, même sur des surfaces complexes comme les tissus. Ce travail dans le domaine de la tapisserie confirme la place de Mazerolle parmi les grands artistes décorateurs de son temps, et montre son engagement envers les arts décoratifs, qu’il considérait comme une extension naturelle de la peinture monumentale.
Alexis Joseph Mazerolle a laissé une empreinte indélébile sur l’art décoratif du XIXe siècle. Ses œuvres, qu’elles soient des plafonds de théâtre, des rideaux de scène ou des tapisseries, témoignent de la richesse de son imagination et de la précision de son exécution. Il a su, tout au long de sa carrière, conjuguer la rigueur académique avec une inventivité qui lui a permis de s’adapter aux exigences de son époque, tout en conservant une singularité qui le distingue de ses contemporains.
Son nom reste associé aux grandes commandes publiques du Second Empire et de la Troisième République, et son influence sur les arts décoratifs se fait encore sentir aujourd’hui. Bien que certaines de ses œuvres aient été perdues, notamment le plafond de la Comédie-Française, son héritage perdure à travers les nombreuses commandes qu’il a réalisées pour les théâtres et les institutions publiques.